LYRISME MUSICAL

LYRISME MUSICAL
LYRISME MUSICAL

On appelle lyrique toute forme d’art où l’œuvre exprime d’une manière spontanée et plus ou moins ardente les sentiments personnels de son créateur. Selon Benedetto Croce, dans le Breviario di estetica (1913), l’intuition artistique (c’est-à-dire la vision de l’artiste) serait «toujours lyrique». Cependant, la tradition esthétique distingue le genre lyrique des autres genres. Selon Schelling, il n’y a que trois genres artistiques, qui sont fondamentaux: le lyrique, l’épique et le dramatique. Toujours selon Schelling, en littérature le lyrisme représente le côté «musical et subjectif de la poésie». En effet, on rapproche volontiers de la musique, comme le mot même y invite, tout art lyrique, et spécialement la poésie lyrique. Brunetière, dans son étude sur l’Évolution de la poésie lyrique en France au XIXe siècle (1894), dit que «l’élément musical» est «essentiel à la définition du lyrisme».

Dans ces conditions, on peut penser, et beaucoup de personnes pensent et affirment avec force, que toute musique est essentiellement lyrique, que toute la tâche du musicien créateur ou même exécutant est d’exprimer des sentiments personnels plus ou moins exaltés, et que le beau musical tient essentiellement dans la réussite de cette tâche, dans la possibilité qu’a l’œuvre d’émouvoir profondément l’auditeur en le faisant participer au sentiment passionné du musicien.

Mais, depuis le milieu du XIXe siècle, cette idée est fortement combattue par des penseurs dont le premier fut le théoricien autrichien Eduard Hanslick, dans son Vom Musikalisch-Schönen (1854), puis par plusieurs autres, dont le plus connu est le musicien Stravinski. Hanslick et Stravinski affirment que le beau musical doit être compris comme lié à des propriétés structurales et perceptibles propres à «l’objet musical» en lui-même, indépendamment des sentiments intimes et personnels de son créateur; que l’œuvre musicale se suffit à elle-même et n’exprime rien qu’elle-même; qu’elle doit être admirée pour ses propriétés esthétiques objectives; et que c’est méconnaître la musique que d’en référer la valeur aux passions subjectives éprouvées par son auteur. Beaucoup d’artistes contemporains (dans tous les arts, et cela fait partie de la crise actuelle des arts) se veulent des créateurs d’objets intéressants par eux-mêmes, et ne se soucient pas de s’exprimer. Parmi eux, les musiciens qui pensent ainsi se déclarent simplement des «fabricateurs d’objets sonores» (Pierre Schaeffer, Henry Cowell, etc.) et soutiennent une théorie objective et antilyrique de l’art musical. À plus forte raison, ceux qui prônent la musique «stochastique» et qui laissent soit le hasard, soit l’ordinateur prendre les décisions structurales les plus importantes dans la création des œuvres.

C’est donc là un des problèmes majeurs de la théorie et même de la pratique musicale actuelle.

Contre le lyrisme

Les arguments des adversaires de la théorie lyrique (ou subjectiviste) de la musique sont de trois sortes: historiques, psychologiques, esthétiques.

Arguments historiques

En fait, on voit dans l’histoire de la musique combien la théorie et la pratique de l’expression des sentiments intimes par l’enthousiasme créateur tiennent peu de place. Les primitifs semblent toujours avoir conçu des données musicales organisées (airs, réalisations instrumentales ou vocales déterminées et dénommées) comme des objets sui generis doués de propriétés généralement voisines de la magie, qui leur sont inhérentes, et produisent leur effet, quels que soient les motifs et les sentiments de l’exécutant. Un r ga (chant magique de l’Inde) était censé incendier tout, y compris le chanteur. L’empereur Akbar, par cruauté ou par scepticisme, contraint le musicien Naiq Gopaul à chanter ce rag. Gopaul, entrant dans l’eau d’un fleuve jusqu’au cou, entonne timidement l’air terrible. L’eau se met à bouillir et le chanteur est consumé par les flammes qui jaillissent.

Sans croire à cette sorte de magie (sauf dans les mythes d’Orphée et d’Amphion), les Grecs avaient des idées analogues quant aux pouvoirs moraux et sociaux liés aux divers modes musicaux , et cela non du fait de leur origine, mais du fait de leur structure.

Enfin, au Moyen Âge, et longtemps après encore, les plus grands musiciens ont été étrangers à cette déviation subjectiviste. De même qu’un faiseur de vitraux du Moyen Âge ne songeait aucunement à exprimer ses sentiments personnels dans ses œuvres, mais tout au plus à exprimer les sentiments collectifs des donateurs, et surtout leurs idées plus ou moins théologiques, de même, vers le même temps, un Philippe de Vitry ou un Guillaume de Machaut, tenants de l’ars nova en musique, n’imaginent pas un instant que les passions de leur cœur aient à intervenir dans leur œuvre musicale et à en rendre raison. Ils cherchent simplement à combiner avec plus d’ingéniosité et de variété que leurs prédécesseurs les matériaux musicaux qu’ils emploient. On l’a dit (Van den Borren): «Sous le règne de l’ars nova , les différents procédés techniques qui gouvernent la composition visent, avant toute chose, à l’ornementation de la parole par la musique, sans que le sentiment exprimé par le verbe y trouve un écho nettement perceptible.»

Mais quatre cents ans après, un géant de la musique comme Jean-Sébastien Bach, écrivant L’Art de la fugue ou même la Messe en si mineur , a-t-il songé un seul instant que ses passions personnelles y puissent s’extérioriser le moins du monde? A-t-il songé à autre chose qu’à édifier monumentalement de belles architectures sonores? Et les seuls passages où l’on y puisse chercher de l’expression ne sont-ils pas, au vrai, purement descriptifs?

De très bons connaisseurs ont cru pouvoir affirmer que Beethoven est le premier qui ait osé introduire dans la musique sa personnalité comme raison d’être. En tout cas, c’est seulement de l’époque romantique que date le mythe du musicien tenant son génie de ses passions, rôle qu’assumaient volontiers un Liszt ou un Berlioz.

Arguments psychologiques

On peut dénoncer encore dans le subjectivisme lyrique un sentimentalisme de mauvais aloi. L’auditeur s’imagine qu’il suffit d’être ému pour comprendre la musique; et cette émotion même a, en lui, des sources bien peu estimables. La dame qui entend un beau chant d’amour ne peut s’empêcher de croire que le chanteur a en lui des trésors de passion, et c’est cela qui la bouleverse. Émotion aussi peu musicale que celle de l’auditeur qui, au concert, apprécie les beaux bras nus de la harpiste. Cela va avec les biographies romancées de musiciens. On plaît à un certain public en lui laissant croire que Schubert a laissé inachevée la Symphonie qui porte ce nom parce qu’il s’est vu repoussé par celle pour l’amour de laquelle il l’avait commencée.

Arguments esthétiques

On fait observer que le fait musical doit trouver en lui-même sa raison d’être; que si, aux mesures 14 à 18 de la Sonate pour piano (1926) de Béla Bartók, l’ut , qui précédemment était diésé, est marqué d’un bécarre, ce n’est pas parce que l’émotion du compositeur le force à baisser le ton (ce qui ne serait qu’un pur accident technique, analogue à un couac d’exécutant), mais c’est qu’ici il faut exposer le thème sous son aspect le plus naturel. Et ainsi de suite. Hanslick disait très élégamment que la rose n’exprime rien par son parfum; que, tout simplement, elle l’exhale; et que, de même, telle inflexion de la mélodie exhale de la mélancolie ou de l’allégresse, sans qu’il y ait à recourir le moins du monde aux états d’âme du créateur, et surtout, sans que les états d’âme du créateur soient raison suffisante et justification de ces inflexions de l’arabesque mélodique. Est-ce à dire qu’un tel rigorisme esthétique élimine absolument de l’art musical les sentiments? Assurément non; mais il les épure. Dorel Handman écrit, à propos de Camille Saint-Saëns (qui florissait au même moment que les poètes de l’école «impassible», tel Leconte de Lisle): «On lui reproche de n’avoir rien recherché en dehors de la clarté des plans, de l’harmonie des formes, de la limpidité du discours. Mais, vécues intensément, ces émotions esthétiques sont-elles moins profondes, moins humaines, que les joies et les douleurs que nous voudrions retrouver sous chaque note qui résonne?

Réalité du fait lyrique

Tout ce qui précède, c’est-à-dire les arguments des objectivistes antilyriques, doit être pris en très sérieuse considération. Cela prouve d’abord qu’il n’est pas vrai que toute musique soit lyrique; ensuite, c’est un avertissement pour éviter de tomber dans les excès du sentimentalisme béotien, et pour porter attention aux qualités propres de l’être musical en lui-même.

Mais cela concédé, il n’en reste pas moins qu’il y a de la musique lyrique. La partie chantée de la Neuvième Symphonie de Beethoven est évidemment lyrique. Dans les Nozze di Figaro de Mozart, l’air de Suzanne au quatrième acte: Deh vieni, non tardar, o gioia bella! a d’incontestables caractères lyriques, bien que Suzanne elle-même ne soit pas un personnage lyrique. Encore tout cela est-il d’appréciation. Mais bien des compositeurs ont affirmé expressément le caractère lyrique de leur œuvre par le titre qu’ils lui ont donné (ou que l’éditeur lui a donné, car il n’est pas toujours facile de distinguer). Un recueil du musicien norvégien Edvard Grieg sous le titre de Lyriske Stykker (Pièces lyriques ) est universellement connu, et on a du musicien autrichien Alban Berg, l’auteur de Wozzeck , une Lyrische Suite für Streichquartett (Suite lyrique pour quatuor à cordes ) qui, malgré la place donnée aux structures dodécaphoniques, se réclame, par son titre même aussi bien que par certains détails, de l’expressionnisme romantique.

On pourrait donner bien d’autres exemples. Ceux-ci sont déjà instructifs. En quoi les morceaux de Grieg ainsi réunis sont-ils lyriques? Beaucoup d’entre eux – Soir en haute montagne , Silence en forêt , Petit Oiseau , Marche des nains – ont un caractère fortement descriptif, et par exemple n’étonneraient pas dans l’atmosphère des Tableaux d’une exposition de Moussorgski. En les qualifiant de lyriques, on veut dire – et cela s’appliquerait mieux encore à d’autres morceaux, tels que les deux Halling (danses norvégiennes) du recueil, ou le Chant des marins , ou les Souvenirs divers – que l’auteur a surtout cherché à reconstituer une certaine atmosphère sentimentale, particulièrement liée à ce qui procède, chez lui, de l’amour de sa patrie: paysages, traditions, milieux. Toutefois, une nuance très importante est ici à observer, c’est qu’assurément cet amour profond pour son pays (dont il est resté pour ainsi dire l’interprète attitré) n’a pas dispensé le musicien d’inventer certains rythmes, certains contours mélodiques, certains dispositifs harmoniques à ce point caractéristiques qu’ils permettent souvent à l’auditeur de reconnaître aussitôt l’auteur. Les dons de l’imagination sont aussi indispensables et aussi caractéristiques que ceux du sentiment. Jamais le sentiment, si intense, si passionné qu’il soit, n’a assuré à un musicien, pas plus qu’à un poète, à un peintre ou à un sculpteur, ce que l’imagination seule peut apporter, dans ses dons terriblement gratuits – terriblement, car personne ne sait d’où cela vient, ni comment cela se fait. Ce serait trop commode, si la sincérité de la passion suffisait à inspirer les plus beaux mots d’amour ou les cris de douleur les plus sublimes. Il faut, si l’on peut s’exprimer ainsi, que les dieux mêmes collaborent. On en a une preuve dans la Neuvième Symphonie . Que Beethoven ait mis toute sa souffrance dans cet héroïque renversement de la douleur à la joie et dans ce triomphe terminal de la joie, n’en doutons pas. Cependant une documentation biographique et musicologique précise apprend combien d’efforts et de recherches laborieuses il a fallu à Beethoven pour trouver le motif qui commence à évoquer la joie de tous les êtres; finalement, pour ce thème, il a repris avec de profondes modifications de rythme un motif qu’il avait déjà utilisé dans une œuvre d’une inspiration très différente. Il semble qu’il ait découvert tout à coup que ce texte antérieur était par lui-même, en en modifiant d’une certaine manière la forme, en état d’éveiller cette joie cosmique qu’il fallait faire tressaillir dans l’univers musical qu’il créait, afin de l’animer de cette joie peu à peu triomphante.

C’est à dessein qu’on a proposé l’exemple de l’air de Suzanne dans Mozart. Or, assurément, ce ne sont pas des sentiments personnels de Mozart qui sont exprimés ici. Et dans la musique dramatique, où l’on observe tellement de beaux exemples de lyrisme (il y en a d’admirables dans Wagner), l’élan lyrique mis en œuvre est celui du personnage et non de l’auteur. Il y a là une question.

Lyrisme objectif

Parler de lyrisme objectif peut paraître affreusement contradictoire. Cependant, c’est là un cas si fréquent dans l’art qu’il faut y voir au moins un problème fondamental. Il s’agit de ces œuvres musicales dans lesquelles l’auteur ne chante pas ses propres émotions ou passions, mais celles d’un personnage, réel ou supposé, et en particulier celles d’un personnage d’une œuvre poétique ou dramatique. Mozart fait chanter Suzanne, Wagner fait chanter Isolde. Le théâtre qu’on appelle par excellence le théâtre lyrique pose sans cesse une telle situation artistique.

On dira: le compositeur, en ce cas, se met à la place de son personnage, et ressent ses émotions; il chante ces sentiments comme s’ils étaient siens.

Ce n’est pas tout à fait exact. Le compositeur en pareil cas peut donner à sa mélodie les accents caractéristiques d’une passion, sans être obligé de l’imaginer sienne. Wagner s’est peut-être identifié à Tristan, mais sûrement il identifiait Isolde à Mathilde Wesendonck, dont il lui suffisait d’avoir connu les accents passionnés pour les redire musicalement. Et Mozart donne au chant de Suzanne les élans absolus de la passion. Il suffit de voir comme ce chant monte par bonds successifs, puis retombe en cascade comme une eau débordante, pour y reconnaître les allures mêmes de la passion, et pour forcer l’auditeur, qui suit ces élans, à donner à ses propres sentiments, quels qu’ils soient, les mêmes allures, les mêmes élans. Cette musique objectivement lyrique, c’est celle qui emprunte ses formes à celles du sentiment jaillissant, mais qui les ennoblit esthétiquement en les rendant musicales. Car, on l’a dit tout à l’heure, il ne suffit pas que le musicien s’abandonne au sentiment, personnel ou emprunté, qui l’anime: rien ne le dispense d’inventer une forme musicale esthétiquement satisfaisante, en même temps qu’elle satisfait à l’exigence sentimentale.

Or, on discutera toujours en vain sur le problème de savoir si c’est parce que Wagner était fortement épris de Mathilde Wesendonck que le Tristan est si beau; ou si c’est parce que le Tristan se faisait en beauté que Wagner fut si épris de Mathilde, obéissant à l’appel de l’œuvre, qui exigeait de lui des accents passionnés. Une chose est sûre, pour les auditeurs: ce n’est pas parce que Wagner était épris que nous frémissons à ces accents passionnés, c’est parce que le Tristan est beau. La beauté de l’œuvre ennoblit même la passion, assurément bien coupable, de Wagner pour la femme de l’hôte qui l’avait recueilli. La clef du problème est dans cette phrase de Wagner écrivant à Mathilde, sept ans après: «D’avoir écrit Tristan , je vous demeure reconnaissant en toute éternité du fond de l’âme.» La beauté musicale de l’œuvre est pour ainsi dire rédemptrice de cet amour coupable. La vraie musique lyrique est celle qui prend les accents de la passion et nous permet ainsi d’y participer, tout en les transformant en beauté pure.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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